
Soins de santé
La drépanocytose est une maladie des globules rouges très invalidante qui touche en particulier les Afrodescendants. Depuis 2023, la Fédération Wallonie-Bruxelles a systématisé le dépistage à tous les nouveau-nés.
Publié le: 20 février 2025
Par: Julie Luong
3 min
Photo : ©AdobeStock // La maladie provoque aussi une vulnérabilité accrue aux infections, de l’anémie (pâleur, fatigue), de l’ictère (yeux jaunes) et des crises vaso-occlusives causées par l’obstruction des petits vaisseaux sanguins par les globules anormaux.
Chaque année dans le monde, 300.000 enfants naissent avec la drépanocytose. En Belgique, elle touche 1 enfant sur 1.500 naissances, ce qui en fait la maladie génétique la plus fréquente (à titre de comparaison, la mucoviscidose touche un enfant sur 2.850 naissances). Pourtant, "c’est une maladie qui reste méconnue, y compris au sein du monde médical", constate le Dr Martin Colard, hématologue à l’Hôpital Universitaire de Bruxelles (Hôpital Érasme) et spécialiste de cette pathologie.
Caractérisée par une anomalie des globules rouges (qui prennent la forme d’une faucille), la drépanocytose se manifeste par des crises douloureuses, en particulier au niveau des membres et du dos. La maladie provoque aussi une vulnérabilité accrue aux infections, de l’anémie (pâleur, fatigue), de l’ictère (yeux jaunes) et des crises vaso-occlusives causées par l’obstruction des petits vaisseaux sanguins par les globules anormaux. Actuellement, la prise en charge de la maladie repose essentiellement sur les transfusions et l’hydroxyurée, un médicament de chimiothérapie qui a permis d’améliorer considérablement le quotidien des patients. Néanmoins, l’impact sur la qualité de vie reste majeur : "Aujourd’hui, seules 15 % des personnes drépanocytaires travaillent à temps plein", rappelle Martin Colard.
Dr Martin Collard
Résultante d’un phénomène adaptatif face au paludisme, la drépanocytose s’est d’abord répandue dans les territoires historiquement touchés par la maladie, comme l’Afrique centrale, les Caraïbes, l’Inde, le Pakistan, le Bangladesh, et plus largement, le bassin méditerranéen. En Afrique centrale, environ une personne sur quatre est porteuse saine : elle n’est pas malade mais elle peut transmettre la maladie si elle conçoit un enfant avec un autre porteur sain. Le risque que l’enfant soit malade est alors d’un sur quatre.
"Les patients ont besoin d’être transfusés régulièrement, que ce soit pour leur traitement habituel ou pour faire face aux complications aiguës. Mais aujourd’hui, beaucoup de patients manque de sang compatible", regrette Martin Colard. Au-delà des grands groupes sanguins, il existe en effet de nombreux sous-groupes sanguins, inégalement répartis dans le monde. Les patients drépanocytaires ont besoin de recevoir un sang du même sous-groupe que le leur, au risque de réactions graves. "Or en Belgique, la majorité des donneurs sont blancs." En 2024, la Croix-Rouge a lancé pour la première fois une campagne d’appel au don de sang à destination des personnes issues des diasporas africaines en Belgique, afin de combler ce manque.
Depuis 2023, la Fédération Wallonie-Bruxelles a systématisé le dépistage de la drépanocytose à tous les nouveau-nés grâce au test de Guthrie (dépistage d’une série de maladies congénitales par prélèvement de sang dans le talon du nourrisson). Asymptomatique dans les premiers mois, la maladie rend les bébés particulièrement vulnérables aux infections : des traitements préventifs sont nécessaires. "Il est aussi possible pour les couples de réaliser une consultation préconceptionnelle", explique Martin Colard. Ces consultations sont particulièrement recommandées si l’un des membres du couple est Afrodescendant. "Lorsqu’un risque existe, on peut proposer un dépistage préimplantatoire dans le cadre d’un parcours PMA. Enfin, si la femme est déjà enceinte, en concertation avec elle et dans les limites de la législation, on peut réaliser un dépistage prénatal pour éventuellement avoir recours à une interruption médicale de grossesse. »