Seniors
Au Centre hospitalier neurologique William Lennox, à Ottignies, un simulateur de conduite innovant offre aux patients en réadaptation des bénéfices tant ergothérapeutiques que neuropsychologiques.
Publié le: 24 janvier 2025
Par: Valentine De Muylder
4 min
Photo : ©AdobeStock - Acquis par l’hôpital il y a environ un an, l’usage du simulateur de conduite constitue une première en Wallonie
Les mains sur le volant et les yeux rivés sur un large écran incurvé, Stéphan Misson circule dans le paysage virtuel du nouveau simulateur de conduite automobile du Centre hospitalier neurologique William Lennox. Victime d’un traumatisme crânien, ce patient renoue ici avec des sensations familières : "Contact, ceinture de sécurité, réglage du siège et de la hauteur du volant, pédales (accélérateur, frein et embrayage), clignotant, frein à main, changement de vitesse… On a presque l'impression d'être dans une vraie voiture."
Acquis par l’hôpital il y a environ un an, l’usage de cet outil innovant constitue une première en Wallonie. Grâce à une mise en situation très proche de la réalité, il permet d’évaluer et d’entrainer l’aptitude à la conduite de patients présentant une lésion cérébrale. Ces personnes ont en effet l’interdiction légale de reprendre le volant pendant les six mois qui suivent l’apparition de la lésion, le plus souvent suite à un AVC ou un choc accidentel. Passé ce délai, si leur situation l'autorise, elles peuvent passer une évaluation organisée par le département d’aptitude à la conduite (DAC) de l’Agence wallonne pour la sécurité soutière.
L’utilisation du simulateur aide à s’y préparer, observe Julie Klinck, ergothérapeute : "Plus fidèle à la réalité que les anciens simulateurs, il permet aux patients de se réapproprier les gestes du quotidien." Il sert également à évaluer si les patients disposent encore de suffisamment de force et de sensibilité dans les membres pour actionner les commandes et à tester concrètement des adaptations, signale-t-elle : "On a pas mal de patients qui se retrouvent paralysés d'une partie du corps, et qui ne peuvent donc plus utiliser une voiture classique. Il leur faudra une voiture adaptée. Ici, ils vont pouvoir commencer à apprendre comment fonctionne une boule au volant, ou un frein au volant."
Le système propose également d’opter pour une boite de vitesse manuelle ou automatique, un territoire urbain ou rural, de choisir la météo, ou encore le niveau de difficulté… Ces scénarios variés, combinés à un champ visuel large, permettent d’évaluer et de travailler la capacité des patients à être attentifs et réactifs, explique Hoëlle Genot, neuropsychologue : "On va progressivement augmenter les sollicitations attentionnelles, en rajoutant des obstacles, des piétons, des feux… On peut aussi augmenter la difficulté en distrayant le patient, ou en lui proposant de conduire sur base d’un itinéraire GPS qui apparaît dans un coin de l’écran…"
S. Misson
Mais le nouveau simulateur ne convient pas à tout le monde, précise-t-elle : "Pour des raisons parfois d'âge avancé, il y a des personnes qui n'ont pas l'élan d'aller se mettre dans quelque chose de virtuel. D’autres ne supportent pas très bien les sensations, car le corps ne bouge pas. Il n'y a pas de coordination entre ce que le patient voit à l’écran et les mouvements du fauteuil, comme dans une vraie voiture, ce qui peut donner la nausée." Pour ces personnes, il existe d’autres manières de revenir à la conduite, rassure-t-elle.
Stéphan Misson fait partie des patients qui apprécient l’exercice : "Ce n’est pas un jeu vidéo mais un simulateur très réaliste qui motive pour l'avenir, quand le moment sera venu de pouvoir conduire à nouveau." Et Julie Klinck de confirmer : "La conduite, c'est l’autonomie. Il y a beaucoup de gens qui conduisent au quotidien. Et souvent, ils se sentent amputés d’une partie de leur liberté." S’installer face à un volant en totale sécurité peut être une occasion de se projeter dans cette autonomie retrouvée, tout en travaillant la confiance et l’estime de soi.