Soins de santé
De nombreux polluants peuvent s'accumuler insidieusement dans une habitation et influencer la santé de ses occupants. Sur prescription médicale, le Sami ausculte les logements.
Publié le: 19 octobre 2023
Par: Julien Marteleur
6 min
Photo: © Adobe Stock
La pollution de l'air est responsable de près de 9.000 décès par an en Belgique, selon l'Agence européenne pour l'environnement. Si l'on entend souvent parler des dangers de la pollution extérieure, on mésestime la nocivité potentielle de l'air qui circule dans les maisons, les bureaux, les salles de sport ou même les bâtiments scolaires ! Face à cet enjeu de santé publique, les Provinces wallonnes ont mis sur pied, au début des années 2000, des Services d'analyse des milieux intérieurs (Sami). Leur mission ? Traquer les organismes vivants et autres substances chimiques néfastes présentes dans le bâti.
Irritation cutanée, yeux qui piquent, toux récalcitrante… peuvent être, dans certains cas, les symptômes d'une maison qui rend malade. Les raisons sont multiples : "Un problème d’humidité peut engendrer le développement de moisissures ou d’acariens auxquels une personne peut être allergique. Les meubles ou les cloisons en bois aggloméré peuvent dégager du formaldéhyde, un irritant des voies respiratoires et des yeux, énumère Catherine Keimeul, responsable du Sami namurois. Certains produits d’entretien, désodorisants, peintures et solvants peuvent aussi libérer des Composés organiques volatils (COV) à l’origine de troubles respiratoires qui, dans certains cas, sont cancérigènes."
Catherine Keimeul ne se déplace jamais chez quelqu'un sans la recommandation expresse d'un médecin. C'est la condition sine qua non pour bénéficier des services – entièrement gratuits – du Sami. Si le généraliste ou le spécialiste estime qu'une pathologie présentée par un patient peut être liée à la qualité de l’air dans l’habitation, il complète un formulaire de demande d’intervention ou établit une prescription médicale. "Avant d'examiner le domicile, je pose quelques questions aux résidents, car leurs conditions de vie peuvent être déterminantes : quelles plantes trouve-t-on dans la maison ? Fume-t-on à l'intérieur ? Y a-t-il des animaux de compagnie ?", explique l'inspectrice namuroise, qui commence toujours ses visites en mesurant la température des murs à l'aide d'un thermo-hygromètre. "Il suffit d'une différence d'un degré d'un mur à un autre pour qu'un pont thermique se crée et que de minuscules moisissures se développent et causent des ennuis." Un prélèvement de l'air est également effectué en culture et envoyé en analyse en laboratoire. Quelques mois après la visite, un rapport est envoyé au médecin et l'évaluation des mesures préconisées est réalisée par téléphone.
Les inspecteurs du Sami sont, en quelque sorte, les véritables "Docteur House" ! Contrairement au héros de la célèbre série télé, ils n'auscultent pas directement les personnes, mais sont plutôt "les yeux du médecin prescripteur", précise Christelle Manette du Sami Luxembourg. "Dans un cabinet de consultation, impossible de remarquer la présence dans le salon d'un cactus dont le mucus peut causer des allergies, ou que le chat dort tous les soirs dans la chambre des enfants. Sans surprise, le tabagisme en intérieur fait également des dégâts."
Quand la présence d'amiante ou de mérule est constatée, le Sami passe alors la main à des laboratoires agrées, mieux armés pour une intervention "en profondeur". Mais dans la majorité des cas, le remède est simple : se débarrasser de la plante incriminée, éviter les meubles en aggloméré, le tabagisme à l'intérieur… et, surtout, ventiler ! Pour que l'air circule efficacement, il faut toujours deux ouvertures, précisent les experts du Sami. En période froide ou humide, ouvrir une seule fenêtre laisse échapper la chaleur tout en favorisant la condensation, propice aux bactéries et autres moisissures…
Chaque année, l'Action radon a pour objectif d'encourager à mesurer le radon dans l'habitation. Faire le test à l’aide d’un détecteur est le seul moyen de savoir si l'on est exposé. Ce détecteur doit être placé dans la pièce la plus fréquentée de la maison (le plus souvent la cuisine ou le salon). La mesure s'effectue pendant trois mois, au terme desquels le détecteur doit être renvoyé pour analyse. Un feuillet reprenant les instructions précises d'utilisation est envoyé avec le détecteur. La campagne se déroule du jusqu’au 31 décembre, ou jusqu’à épuisement du stock. Le coût du détecteur est de 15 euros.
Cependant, tous les problèmes ne peuvent se résoudre en aérant. "Parfois, nous visitons des habitations dans un tel état que la seule solution pour les occupants consisterait à déménager, déplore Catherine Keimeul. Pour beaucoup de gens, ce n'est pas possible. On les oriente alors vers les services sociaux."
En Province de Luxembourg, Christelle Manette est confrontée à un problème prévalent dans la région du fait de sa singularité géologique : le radon. Impitoyable, il pénètre dans le bâtiment par les fissures du sol, les joints entre les parois, le vide ventilé… Sa présence est relevée à l'aide d'un détecteur : "Chez nous, le radon provient principalement du schiste présent dans le sous-sol. Plus de 20 % des maisons de la province sont concernées. Le problème, c'est que ce gaz est très nocif : il est la deuxième cause de cancer du poumon en Belgique, après le tabagisme." Péril en la demeure ? Fort heureusement, des solutions existent. La pose d'un extracteur ou d'un pare-radon (sorte de bâche étanche en plastique spécial) entre le sol et le bâtiment suffit généralement à en protéger les habitants.
Avant d'entrer en contact avec une personne, Christelle Manette et Catherine Keimeul précisent : le Sami est neutre et n'a aucun pouvoir de contrainte, ni dans les conflits entre locataires et propriétaires, ni dans l'obtention d'un statut de "logement insalubre". "Nous ne sommes pas là pour sanctionner les occupants d'une habitation. Nous aidons seulement à affiner un diagnostic médical et proposons des conseils simples à adopter au quotidien pour améliorer la santé en milieu intérieur." Ce qui est déjà beaucoup, quand on sait que le Belge passe en moyenne 80 % de son temps entre quatre murs…
En Wallonie :
À Bruxelles :
Les déjections de ces araignées microscopiques peuvent provoquer des allergies (dermatites, rhinites, asthme, etc.). Elles sont présentes dans les literies, les fauteuils en tissu, les tapis, …
Solutions : mieux réguler la température et l'humidité des pièces, limiter la poussière, utiliser une housse spéciale pour literies. Les aspirateurs ne sont efficaces qu’avec des filtres spéciaux, à remplacer régulièrement.
On le trouve dans les colles utilisées dans la plupart des meubles en bois aggloméré et contreplaqué, desquels il se relâche progressivement. On le retrouve aussi dans certains matériaux isolants et jusque dans les tentures rigides. Symptômes : irritations des yeux, migraines, nausées, somnolence. Il pourrait être responsable de certains cancers.
Solution : ventiler.
Vieilles et/ou mal placées, elles se décomposent en fibres qui peuvent causer une irritation de la peau et des voies respiratoires supérieures (gorge sèche, toux).
Solution : remplacer sans tarder.
Ce gaz inodore résulte d’une mauvaise combustion dans les appareils de chauffage. C'est un redoutable "tueur silencieux". Symptômes : nausées, maux de tête, vomissements…
Solution : ventiler de toute urgence et réparer l’appareil responsable.
Ce gaz radioactif, inodore et naturel est responsable de près de 700 décès par an en Belgique (cancer du poumon). Il s’infiltre dans l’habitat par les fissures.
Solution : ventiler, colmater les brèches ou poser un pare-radon (membrane étanche en plastique spécial) lors de la construction.