Culture

Le chansigne, pour savourer la musique avec les yeux

Contraction des mots "chant" et "signe", le "chansigne" permet de partager le sens, le rythme et la poésie d’un morceau de musique en langue des signes. Les festivals de l’été sont de plus en plus nombreux à accueillir sur scène des chansigneurs et chansigneuses. 

Publié le: 07 juillet 2023

Mis à jour le: 26 septembre 2024

Par: Valentine De Muylder

4 min

Une interprète de chansigne en représentation

Photo: © Shon Jacobs

Il y a vingt ans, des interprètes en langue des signes montaient pour la première fois sur la scène des Francofolies de Spa. Depuis, d’autres festivals, dont LaSemo, ont emboité le pas. Avec leurs mains, leurs corps et les expressions de leurs visages, les chansigneuses et chansigneurs ont à cœur de donner à la musique une dimension supplémentaire.  De quoi contribuer à rendre ces rendez-vous culturels plus accessibles aux personnes sourdes et malentendantes, tout en ouvrant au public entendant les portes de leur univers.

Une poésie du geste

"Il y a une poésie du geste, raconte Christiane Broekman, de l’association Muzik’en Signes, qui interprète depuis dix-sept ans le rendez-vous musical spadois. On va amplifier certains signes, les exécuter d’une certaine manière pour que le résultat soit fluide." Cette interprète professionnelle, qui coordonne également l’interprétation en langue des signes du journal télévisé de la RTBF, insiste sur l’important travail de préparation que nécessite une telle performance. "Cela se travaille très différemment d’un JT, explique-t-elle. Après avoir appris par cœur la chanson d’origine, il faut procéder à son analyse linguistique, la transposer en langue des signes et y mettre du rythme, de l’émotion... Cela devient chorégraphique."

"C’est presque une danse", estime également Cindy Baraté, qui se produit chaque année sur les scènes de LaSemo et des Solidarités. Contrairement à l’équipe de Muzik’en Signes, elle n’est pas interprète professionnelle. Comédienne et musicienne de formation, elle est enseignante pour des enfants sourds et a trouvé dans le chansigne un moyen de concilier ses différents métiers. Sa démarche est donc un peu différente : "Je me considère comme une chanteuse en langue des signes. Je n’ai aucune forme de neutralité. Quand je monte sur scène, c’est de l’art." Une discipline artistique qui se prête qui se prête à tous les styles de musique, puisque Cindy Baraté a déjà "chansigné" sur du rap, du slam, du métal, ou encore aux côtés d’un orchestre philharmonique, dans le cadre d’une performance sans paroles.

La musique en 3 dimensions

Pour Daniel Marenne, responsable des interprètes aux Francofolies de Spa, le chansigne a le don de faire vivre la musique "en 3D" et de créer du lien. Il se souvient non seulement d’avoir été témoin de belles interactions sur scène, mais aussi d’avoir été impressionné de voir des milliers de personnes applaudir en langue des signes, en agitant les mains. En plus de favoriser l’accès des personnes sourdes ou malentendantes à certains concerts, le chansigne a donc pour effet de sensibiliser le reste du public à l’importance et à la beauté de la langue des signes.