Environnement

Bouteille ou robinet : à quelle eau se vouer ?

Eau du robinet ou en bouteille ? Prix, goût, qualité, écologie… Chacun a ses raisons pour privilégier l'une ou l'autre. En Marche fait le point.

Publié le: 23 octobre 2024

Mis à jour le: 25 octobre 2024

Par: Julien Marteleur

7 min

une petite fille inspecte un verre d'eau avec une loupe

Photo: (c)AdobeStock //

Quand il s'agit d'"or bleu", tous les goûts sont dans la nature. Dans nos pays industrialisés, l'eau coule à flot de nos robinets mais certains se refusent encore à la boire. Le scandale des Pfas qui a secoué une partie de la Wallonie en 2023 a rappelé qu’au-delà des normes et des contrôles, les polluants se sont invités durablement dans notre quotidien. Alors, faut-il préférer l'eau des grandes enseignes, qui apporte son lot de questions en termes d’impact environnemental ? Il y a matière à divergence… Une chose est sûre : en Belgique, l'eau disponible est — sauf incident sanitaire — de qualité !

Au robinet 

L'atout-maître : son prix

C'est l'"argument-massue" qui envoie systématiquement l'eau en bouteille dans les cordes : l'eau du robinet est particulièrement économique. Chez nous, le prix de l'eau embouteillée varie entre 0,2 et 2 euros du litre et demi, selon les marques et les enseignes de distribution. Au robinet, elle coûtera en moyenne… 0,075 euros pour la même quantité, selon les chiffres de la Société wallonne des eaux (SWDE). Soit jusqu'à 300 fois moins cher que l'eau en bouteille ! Et elle est encore plus démocratique à Bruxelles.

C'est du propre !

Nitrates, calcaire, chlore, résidus de médicaments (voir notre article p.10), polluants dans les canalisations… Nombreux sont les composants qui font douter de la qualité de l’eau du robinet. "Pourtant, en Belgique, il s'agit sans doute du produit de consommation courante le plus contrôlé et en termes de présence de pesticides par exemple, nous sommes très loin des limites imposées par les normes européennes", souligne Renaud De Bruyn, expert alimentation chez Écoconso. 
Les distributeurs d'eau comme Vivaqua (Bruxelles) ou la SWDE veillent au grain et effectuent plusieurs centaines de milliers d'analyses chaque année. "Les prélèvements s'opèrent à différents endroits, du lieu de captage en sous-sol jusqu'au robinet du consommateur, en passant par les zones de stockage."
Sur notre territoire, trois quarts des réserves d'eaux souterraines ne nécessitent aucun traitement, en dehors du chlore (pour éviter la présence de bactéries lors du trajet jusqu'au robinet).
Notre eau de distribution est globalement de très bonne qualité et respecte les normes de potabilité établies par l'OMS. Elle ne contient pratiquement plus de métaux lourds et la quantité de nitrates est du même ordre de grandeur que dans les légumes. En résumé, on peut la boire sans crainte, même si ce n'est pas de l'eau "pure".

Pas très clair…

Alors, comment expliquer que dans certaines habitations, l'eau du robinet a parfois cette couleur orangée à la sortie ? "Cela est dû à la présence de particules de fer ou de manganèse, explique Julie Frère de l'association de consommateurs Testachats. Cela survient parfois en cas de changement de débit dans le robinet. Il suffit de laisser l'eau couler un peu pour qu'elle redevienne claire."
L'eau a un aspect laiteux à la sortie ? Là encore, pas de panique : "Il s'agit généralement d'un changement de température ou de pression dans les canalisations. On peut même parfois trouver de petites bulles, qui disparaissent rapidement." Aucun danger non plus. 
Attention toutefois, prévient Testachats, à ne pas utiliser directement l'eau chaude du robinet pour préparer le thé, le café ou cuisiner : l'augmentation soudaine de la température pour faciliter la prolifération de bactéries dans les canalisations. Pour la cuisine, mieux vaut partir de l'eau froide et la chauffer sur le feu…

 

Avec ou sans filtre ? 

Chez les "détracteurs" de l'eau du robinet, la question du goût est souvent amenée sur la table. On lui reproche ses effluves de chlore, utilisé comme désinfectant pour rendre l'eau potable. "Le chlore est un volatil. Pour se débarrasser de son goût, il suffit de carafer l'eau pendant une heure avant de la boire", suggère Renaud De Bruyn d'Écoconso. Filtrante, la carafe ? Ce n'est pas forcément une bonne idée, selon le spécialiste : certes, le filtrage va changer le goût de l'eau, mais aussi sa composition ! Adieu calcium, magnésium et autres précieux minéraux… Et puis, l'usage d'un filtre (bâton de charbon, billes de céramique, etc.) implique aussi son remplacement régulier, au risque de voir les bactéries proliférer. "Un souci qui peut se produire également avec les adoucisseurs d'eau mal entretenus, précise Renaud De Bruyn. Et si vous conservez votre eau du robinet dans une gourde, veillez à remplacer l'eau non bue toutes les 24 heures et à nettoyer régulièrement votre bouteille, quelle qu'en soit le matériau." Préférez-la solide, avec un bouchon étanche sans bisphénol A ni phtalates, facile à nettoyer, avec un joint d’étanchéité stable, et d’une contenance adaptée à votre usage.          

En bouteille 
 

Verre ou plastique : même combat

Tirons d'emblée sur l'ambulance : dans ce choc des Titans aquatiques, l'eau en bouteille perd largement le match écologique. "Les bouteilles en plastique (sans compter les films des packs) sont des emballages polluants, qui doivent être transportés, contrairement à l'eau du robinet ", enchérit Renaud de Bruyn d'Écoconso. Chez Testachats, on considère que consommer l'eau du robinet permet d'épargner l'équivalent de 10 sacs PMC par personne par an. Pour celles et ceux qui pensent qu'une bouteille en verre serait plus écologique, c'est aussi la douche froide : "Pour fabriquer une bouteille en verre, il faut beaucoup d’énergie, c’est du sable qu’on doit fondre." Plus lourds à transporter (750 grammes en moyenne), ces contenants en verre vont aussi solliciter davantage de véhicules pour les acheminer jusqu'au point de recyclage ou de nettoyage (pour les bouteilles consignées)…
 

Nanoparticules : mieux vaut prévenir 

Autre mauvais point pour l'eau en bouteille : la dégradation du plastique en microparticules qui "migrent" du contenant au contenu. Selon le SPF Santé publique, ces microplastiques contiennent de nombreuses substances chimiques, qui peuvent s'avérer nocives pour la santé humaine en jouant le rôle de perturbateur endocrinien. Ils s’accumulent également sur Terre et polluent les sols et les écosystèmes pendant des décennies, avec des répercussions tout le long de la chaîne alimentaire, jusque dans nos assiettes. En consommant de l’eau en bouteille plastique, nous contribuons directement à cette pollution. 
Un conseil : mieux vaut respecter la date de péremption présente sur les bouteilles et entreposer celles-ci dans un endroit frais. "La chaleur, comme l'acidité et le gras, facilite la migration de résidus."

Minérale ou de source ?

Il n’y pas de grande différence, elles proviennent toutes deux de sources souterraines et ne subissent pas de traitement, mais les eaux de sources peuvent avoir des compositions variables. On peut par exemple, mélanger deux eaux de sources lors de la mise en bouteille, ce qui n'est pas le cas pour les eaux minérales. "Si on manque de magnésium ou de calcium, mieux vaut se tourner vers une eau riche en minéraux. Mais ces eaux minéralisées contiennent aussi naturellement plus de sulfates, ce qui peut provoquer des diarrhées, précise Julie Frère de Testachats. On ne les préconise pas non plus pour les personnes qui ont des reins fragiles ou les bébés." Quant aux eaux pétillantes, elles contiennent des bicarbonates qu'on ne retrouve pas dans les eaux plates. C'est notamment utile pour la récupération musculaire. Mais prudence pour les estomacs et intestins sensibles…