Inclusion

Les entreprises de travail adapté, une plus-value sociale en Wallonie

En Wallonie, 10.250 personnes dont 84 % en situation de handicap travaillent dans une entreprise de travail adapté (ETA). 60 ans d'expériences confortent le secteur dans ses choix sociaux et économiques. 

Publié le: 19 février 2024

Mis à jour le: 26 septembre 2024

Par: Joëlle Delvaux

4 min

Ouvrière dans une Entreprise de travail adapté

Photo: En entreprise de travail adapté, l'entreprise s'adapte au handicap et pas l'inverse. © Eweta

Offrir aux personnes handicapées une activité adaptée à leurs capacités, et rémunératrice dans un cadre de travail protecteur: c'est de cette préoccupation que sont nés les ateliers protégés au début des années 60. Conçus comme tremplin vers l'emploi ordinaire, ils n'ont pourtant jamais réellement rempli cette mission. "Quoique louable, cette intention a vite démontré ses limites, reconnaît Stéphane Emmanuelidis, Président de l’Eweta, la Fédération wallonne des ETA.
Elle imposait à un public déjà fragilisé le défi permanent de devoir progresser et changer d’emploi, et ce dans un profond sentiment d’inaboutissement, d’insécurité et de frustration."

Il a fallu attendre le milieu des années 90 pour que les pouvoirs publics actent le professionnalisme de ce secteur économique à vocation sociale et accordent de véritables droits sociaux aux travailleurs en situation de handicap. Rebaptisés "entreprises de travail adapté", les ateliers sont devenus des entreprises d’insertion en soi. La création d'une commission paritaire sectorielle et l'instauration du salaire minimum ont pleinement inscrit les ETA dans le paysage socio-économique.

Des emplois stables et durables

On dénombre 53 ETA actives en Wallonie : 52 % de leurs travailleurs souffrent d’un handicap mental, 41 % d’un handicap physique et 7 % d'un handicap sensoriel. 10 % appartiennent aux deux premières catégories. En Région wallonne, les ETA de plus de 50 travailleurs doivent légalement compter 20 % de personnes en situation de handicap parmi les encadrants (moniteurs, comptable, direction, etc.). Le secteur fait mieux avec 30 %.

"En ETA, l'entreprise s'adapte au handicap et pas l'inverse. C'est très confortable et rassurant pour les travailleurs, lance Gaëtane Convent, directrice de l’Eweta. Notre société n'est pas assez inclusive. Partout les personnes en situation de handicap doivent s'adapter. Au sein de l'ETA, le handicap ne se voit plus. La personne est avant tout une travailleuse qui effectue des prestations de qualité, perçoit un salaire et cotise à la sécurité sociale. Cette contribution à la solidarité, c'est fondamental. Cela participe grandement au sentiment d'inclusion."

Cela étant, Gaëtane Convent est d'avis qu’il est important de mener une réflexion sur la responsabilité d’inclusion de toutes les entreprises privées et publiques. En France, par exemple, les entreprises d’une certaine taille sont contraintes d'engager un pourcentage minimum de travailleurs porteurs de handicap, et des sanctions financières leur sont appliquées en cas de non-respect du quota. L’argent récolté bénéficie alors aux secteurs actifs dans le monde du handicap.
Par ailleurs, la directrice de l'Eweta plaide pour davantage de collaborations entre les entreprises dites classiques et les ETA.

De l'économie sociale

En tenant compte de la diversité des handicaps et du vieillissement du personnel, chaque ETA doit trouver le juste équilibre entre des activités moins, voire pas rentables, et des services à haute valeur ajoutée qui nécessitent investissements et formations à des métiers techniques. Une alchimie complexe dans un contexte économique et compétitif difficile. 
Les ETA reçoivent des subsides de la Région mais ils ne couvrent que 40 % des rentrées. "Les subsides servent à assurer l'encadrement nécessaire des ouvriers, à adapter les postes de travail, à organiser la formation continue, à compenser aussi la perte de productivité, précise Gaëtane Convent. En définitive, le consommateur ou le client qui fait appel à une ETA ne paie pas plus ou moins cher qu'ailleurs. Et la prestation ou le service qu'il reçoit répond aux mêmes exigences de qualité. En revanche, il sait qu'en faisant le choix de l'ETA, il participe à une économie locale sans but lucratif et à un projet solidaire et équitable".